De la Masse à la Vie

Sculptures Anne Boisaubert

« L’Or de Camille » – Hommage à Camille Claudel

L'Or de Camille - Sur les pas de la grande sculptrice

Mon admiration pour Camille Claudel remonte à de longues années,
ses œuvres vibrantes d’où jaillit si puissamment la vie, sa vie, m’ont toujours touchée, infiniment.

Alors, quand en ce mois d’octobre 2023, Olivier Claudon, me propose d’être invitée d’honneur sculpteur du prochain Festival international de Sculpture « Camille Claudel » à la Bresse en mai 2024, je ressens une immense joie !
Une joie double, puisque je vais pouvoir rendre hommage à Camille Claudel, sur les terres de sa famille paternelle, qui est une région de cœur et d’ héritage également pour moi, car elle est aussi celle de mes parents et de mes ancêtres !

L’ année 2024 marque également le 160ème anniversaire de la naissance de cette immense sculptrice, née le 8 décembre 1864 à Fère en Tardenois dans l’Aisne. Un plaisir et un honneur de créer des oeuvres en sa mémoire.

La Bresse, vers 1904
La Bresse, mai 2024

Un thème inspirant : Des racines et des ailes

Le thème du Festival « Des racines et des ailes » m’invite immédiatement à partir sur les pas de Camille Claudel enfant.
Si je connais bien Camille de par mes nombreuses lectures et recherches sur elle depuis des années, je n’ai jamais encore foulé le sol de Fère-en-Tardenois et de Villeneuve-sur-Fère, dans l’ Aisne, où elle est née et a grandi !

J’obtiens très vite un rendez-vous avec Claire Debout, responsable de la Maison Musée « Camille et Paul Claudel » de Villeneuve sur Fère, qui se montre sensible à mon projet, et m’offre un moment d’échange et de partage au delà de mes espérances. 
Je découvre d’abord la très belle Maison Musée, le rez de chaussée est consacrée à Camille, l’étage à Paul.

Fère-en-Tardenois, où est née Camille. Et l'église où elle a été baptisée.
Maison Camille et Paul Claudel à Villeneuve sur Fère, maison de leur toute petite enfance.
Oeuvres de Camille

Puis nous visitons ensemble la « Hottée du diable », terrain de jeux d’enfance de Camille et de son petit frère Paul

Faisant part de mon souhait à Claire de rapporter  un peu de terre du pays d’enfance de Camille, pour pouvoir l’intégrer à mon œuvre à venir, elle m’offre tout un pain d’argile, extrait en profondeur dans le bois de la Tournelle, un cadeau précieux qui me remue au plus profond ! Je ferai alors de cet instant et de cette image ma carte de vœux 2024 !

De retour dans mon atelier, je peux alors me lancer corps et âme dans le projet, fébrile, mon élan et mon inspiration vont me porter durant quelques mois dans une aventure artistique d’une très grande intensité. L’âme de Camille envahit l’atelier, j’en suis sûre, elle va m’aider !

Je commence par créer un buste de Camille.
Je m’inspire de plusieurs photos d’elle, en privilégiant dans mon travail son regard intérieur, reflétant sa vie et ses tourments.  « Il y a toujours quelque chose d’absent qui me tourmente » avait-elle écrit dans une de ses lettres à Rodin.
Elle est bien là face à nous,  mais elle ne nous voit pas, ne nous entend pas, elle est plongée dans ses pensées,  ses tourments, ses secrets…

Qui d’autre, pour l’accompagner dans ce voyage vers les Vosges, que son père Louis Prosper, né à la Bresse.  Racines indéniables, il a été ses ailes aussi, puisque toute sa vie durant, il a encouragé Camille dans son art, en lui offrant son soutien moral et financier.
Dans le buste que je propose,  il la couve de son regard, préoccupé certes car il est conscient de ses difficultés, mais également très aimant.

Ces deux bustes en terre cuite sont fondus en bronze dans la foulée, à la Fonderie d’Art Afb de Châteaudun, pour être présentés au Festival international Camille Claudel de la Bresse en mai 2024.

L' Or de Camille

Je me lance alors sur une troisième création, pour creuser plus loin encore sur le thème  « des racines et des ailes » du Festival. L’oeuvre sera alors présentée pour la première fois au public, en terre cuite, à la Bresse en mai 2024.

« l’Or de Camille » de face, nous donne à voir Camille jeune femme sculpteur, dans la splendeur de ses plus belles années de création, les mains ouvertes telles des ailes, pour accueillir le ciel, l’infini, l’absolu.
Au dos, dans les plis de sa robe, nous la retrouvons aux racines de sa vocation, petite fille,  travaillant, de ses mains vibrantes déjà, cette glaise extraite du pain d’argile que j’ai rapporté de son pays natal, et qui a pris, après la cuisson, cette merveilleuse teinte rouge brique ! Camille est assise « dans la gueule » d’un des rochers de la « Hottée du Diable », ce terrain de jeux extraordinaire, non loin de Villeneuve sur Fère,  le préféré de la fillette et de son petit frère Paul, qui derrière elle, admiratif, la regarde travailler.

Le rocher de la Hottée du Diable reproduit dans mon oeuvre ci-contre

Dans l'atelier , les étapes de la création en terre

Je commence par créer une petite ébauche en terre, une esquisse, qui va me permettre de mettre mon idée en volume, de rechercher le mouvement de l’ensemble, et d’appréhender les points difficiles …

J’ai choisi ma terre, une terre gris noir, finement chamottée, qui vient des Etablissements de terre Bermann à Paris Pantin, et je me lance…
Là, c’est de la joie pure
, l’élan est tel qu’il m’ emporte, je suis totalement happée par mon projet… je flirte avec le sacré… La musique de Debussy accompagne mon geste, et plus particulièrement sa « Rêverie » que j’associe à ma création…
Camille est partout dans l’atelier, saurais-je l’honorer à la hauteur de ce qu’elle fut…

Tout va s’enchainer, sereinement, la foi, le plaisir sont mes alliés… je vis des heures lumineuses et de don total, et peu à peu, les traits se placent, s’affinent, deviennent évidents, habitent la terre.

Les volumes sont placés, il me faut maintenant évider l’œuvre, une étape délicate mais essentielle pour prévenir de toute fissure ou éclatement lors de la cuisson à venir !
Le travail peut alors se poursuivre en toute sérénité…

L’œuvre est terminée, il faut la faire sécher, avant que je ne la confie au potier pour cuisson… Durant trois jours, la température va monter progressivement jusqu’à 950/980°, puis redescendre tout aussi doucement…

Cuisson réussie ! Soulagement et joie mêlés

La voici en terre cuite. C’est l’œuvre dite originale qui va alors pouvoir être apportée à la Fonderie d’Art pour devenir bronze.
Photos JF Rozé

Le Festival International Camille Claudel dans les Vosges

Mes trois œuvres « Camille », « Louis Prosper » et « L’or de Camillese préparent au grand voyage vers les Vosges, aux côtés de toutes mes autres créations (30 au total), où elles vont investir une très belle salle à la Maison de la Bresse, au cœur de la ville, pour vivre pleinement le Festival international de sculpture Camille Claudel où je suis invitée d’honneur sculpteur.

Trois jours d’installation, pour créer une scénographie autour du plot central où trônent mes  trois œuvres qui honorent Camille Claudel. Un immense Merci à Olivier Claudon, peintre local et international réputé, l’un des piliers et fondateur du Festival, concepteur de toutes les affiches,  qui m’a apporté son aide précieuse durant toute la mise en place ! Merci également aux petites mains présentes également ! J’ai été reçue et choyée comme une reine !!!

Vernissage, accueil des visiteurs, visites contées, projection au cinéma Grand écran de la Bresse, retrouvailles en famille, entre amis, douze jours intenses avec Camille au centre de toutes les attentions ! J’ai même eu la joie d’accueillir des visiteurs venant des terres natales de Camille, surpris et heureux de voir affiché au mur un lieu très  familier, la Hottée du diable !

La Presse en parle…

Ce séjour à la Bresse fut aussi l’ occasion de marcher sur les pas de Louis Prosper et de Camille lorsqu’elle y venait en vacances avec sa famille.
Je tente, aidée de passionnés, de retrouver l’emplacement de la maison de Louis Prosper, mais la ville a été quasi totalement détruite lors de la seconde guerre mondiale et les archives ne permettent pas de retrouver le lieu précis… Il est fort probable qu’elle se trouvait entre l église et l’ancienne mairie, à suivre…

Un autre moment d’émotion, le « pèlerinage » sur un lieu que Camille appréciait beaucoup enfant, le lac des Corbeaux où elle a pu se baigner et toujours prisé des locaux et des touristes.

Retour à Orleans - Les suites...

Juillet 2024. Claire Debout de la Maison Camille et Paul Claudel me rend visite dans mon atelier pour découvrir « L’Or de Camille » finalisée, encore un magnifique moment de partage, sept mois après notre première rencontre à Villeneuve-sur-Fère !

A la Fonderie d'Art

Rendez-vous dans la foulée chez les fondeurs à Châteaudun pour déposer « L’or de Camille ». J’ai l’honneur d’être accompagnée de Claire Debout, qui va rencontrer Olivier Delmas de la Fonderie AfB, et découvrir tout le processus de fabrication d’un bronze.
Le lien de cette Fonderie avec Camille Claudel n’est pas des moindres; leurs parents et grand-parents ont travaillé aux côtés de Reine Marie Paris, pour réaliser des bronzes, refondre, ciseler, patiner des œuvres de Camille. Ce sont eux également qui ont tiré tous les plâtres des sculptures de Camille pour les besoins du film « Camille Claudel » de 18987 de Bruno Nuytten avec Isabelle Adjani dans le rôle de Camille;
Arnaud Delmas, ciseleur depuis plus de 40 ans, se souvient avec émotion de la signature de Camille qu’il devait apposer sur ses œuvres ainsi que du jour où Reine Marie Paris lui a offert son catalogue raisonné sur Camille dédicacé !

Juillet 2024. Olivier Delmas nous accueille à la Fonderie

S’ensuivent toutes les étapes nécessaires à la réalisation d’un Bronze.
Confection du moule en élastomère avec Julien Delmas.

Une fois le moule terminé, il est ouvert pour en extraire mon œuvre originale en terre cuite.

Tirage de la cire et les retouches.
J’ai proposé à Juline Jamin, stagiaire alors à la mediathèque de Châteaudun, de venir découvrir la Fonderie, et le travail de la cire. Elle y participe avec joie et enthousiasme.

La cire est alors « alimentée », emplie de plâtre réfractaire à l’intérieur  et à l’extérieur. C’est la fabrication du second moule qui va passer quelques jours au four, afin que la cire fonde et laisse la place au bronze en fusion (1100 à 1200 degrés) lors de l’ étape suivante, la  coulée.

Après la coulée, l’étape de la ciselure, une étape longue et délicate confiée aux soins d’Arnaud Delmas et ses longues années d’expérience !

La patine, l’étape ultime, celle qui consiste à donner à l »œuvre sa teinte finale.
Réalisée au chalumeau et avec des acides, oxydes différents selon la teinte souhaitée (marron clair ou foncé, bleu, bleu vert, vert marron, noir, etc…).
Julien passe entre 4 et 9 couches de patine sur l »œuvre qui passe par autant de couleurs, ce qui lui permettre de dévoiler par transparence un dégradé de nuances.

 

Arnaud passe la fraise sur la terre au creux des mains de Camille enfant, afin de lui donner une couleur « or »

Le Bronze Original  numéroté 1/8 est né et peut alors cheminer avec moi au fil de mes expositions , en attendant un jour d’être adopté…
Photos JF Rozé

L'invitation à la Maison Musée Camille et Paul Claudel

Et comme un retour aux sources, « L’Or de Camille », mon œuvre originale en terre cuite, sera, sur proposition de sa responsable Claire Debout, accueillie dans la Maison Musée Camille et Paul Claudel à Villeneuve-sur-Fère , du 6 juillet au 5 octobre 2024. La convention de prêt a été signée.
Je ne pouvais imaginer plus beau cadeau, plus belle reconnaissance, pour cette œuvre qui honore Camille sur ses terres d’enfance. Merci infiniment à Claire Debout et tous les acteurs qui ont initié et porté ce magnifique projet . 
Et un immense Merci à Camille Claudel !

Dans le cadre de ce prêt, j’aurai la joie de rassembler les visiteurs autour d’une Projection :  « Une œuvre de l’idée au bronze final » le dimanche 6 juillet à 16h dans le jardin de la Maison Musée.

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